L’humain n’est pas fait pour voler. { Angela et Justin please }

Voilà maintenant vingt quatre heures que je n’ai pas vu Angela mais j’ai confiance. Je sais que l’on se reverra. J’en suis certain. Profitant d’un timide rayon de soleil j’en profitai pour découvrir Luton sous ce dernier. En réalité je n’avais pas grand espoir. Cela fait des années et des années que j’erre à Luton. J’en connais les moindres recoins alors qu’il fasse beau, qu’il neige, ou qu’il pleuve ne changera rien pour moi. L’intérêt de cette balade ? Séchage. Séchage en pleine air. Avec toute cette pluie, je suis détrempé. Jusqu’à l’os. Pas très agréable hein ? Je croisais peu de gens. La plupart pressaient le pas en me fuyant du regard. Ils ont peur de quoi ? Que je les bouffe peut-être ? Le cheval est un herbivore. Herbivore. Qui mange de l’herbe. Pas des humains stupides. Désespérant. Désespérément Humain. Typique.
A mon tour je les ignorai, gardant la tête haute, ne manquant jamais de les bousculer, soit disant accidentellement. La vérité ? Je prenais plaisir à les pousser. Je suis un animal. Pas une peluche.

Je me promenais au hasard sans but précis avec pour seule compagnie le soleil. Après la pluie vient le beau temps. Qu’on est bien au soleil… Je m’arrêtai, me secouai en fermant les yeux et reprit mon chemin en trottant allégrement. J’étais heureux. Heureux qu’il fasse beau. Heureux de ma balade. Heureux de vivre. Heureux de tout. Je me laissai aller jusqu’à hennir. En me remettant au pas, je vis la gigantesque structure de l’aéroport plus loin. Immense animal d’acier et de verre. En me rapprochant je songeai aux avions. Au ciel. Aux nuages. Au rêve humain. Pas n’importe quel rêve. Celui de voler. Ils sont des imbéciles. L’humain n’est pas fait pour voler. Il est à peine fait pour marcher sur ses deux pattes. Bien évidemment, il y a des exceptions à tout mais elles sont là pour confirmer la règle.

L’aéroport. Lieu sans visage. Sans identité. Des milliers de passagers affluaient dans le même lieu. Sans se connaître. Sans forcément parler la même langue. Sans avoir la même couleur de peau. Et pourtant, dans le fond ils se ressemblaient tous car ils s’évadaient tous. Parfois d’une cage d’or, parfois d’un taudis. Tous s’évadaient. Mais pas toujours de leur plein grés. Cette ressemblance les unissait. L’aéroport est la cible des attentats. Pourquoi ? Parce qu’il est Unique. Parce qu’il représente le principal moyen de quitter le pays. Sans lui, vous détruisez un bout de l’économie. Un grand bout. Vous détruisez le rêve de certain. Le moral d’autres. Ou encore, leur sécurité fictive.

Je me souviens. Je me souviens mais cela est très loin. Cela remonte à beaucoup d’années en avant. Un peu trop pour ma pauvre tête de cheval. D’ailleurs, je secouai cette dernière comme pour faire apparaître ce souvenir caché par la poussière du temps. Ca y est. Je le tiens. En partie. Il s’est passé quelque chose de grave ici. En m’approchant je sens encore l’odeur de la mort. Oui. Voilà. La mort. Des centaines de personne sont mortes ici. Comment. Comment sont-elles mortes. Ah. Un avion s’est écrasé sur la structure. Il s’est même enflammé. Suite à une fuite de kérosène, le tout s’est enflammé. Les survivants incapables de bouger à cause de leur blessure causée par l’accident, brûlèrent vives. Peu de gens s’en sortir. En quelle année était-ce déjà ? J’ai du mal à situer cela à la perfection…Dix-neuf cent…

- Mille neuf cent soixante-huit. Le premier octobre mille neuf cent soixante-huit.

Sursautant de surprise, je me retourne vivement. Justin ! Justin Case. Comment peut-il savoir ça lui ? Je lui donne à peine dix-neuf ans, comment se fait-il qu’il connaisse la date exacte ? Il n’était pas né sinon il aurait cinquante huit ans ! Surpris, je le fixe. Il ne pouvait pas être né…De nouveau une question traversa mon esprit : était-il réellement humain ? Il dut lire dans mes pensées ou bien ce fut Wolfang qui l’en informa car il rit. Oh mon Dieu quel rire charismatique et suave ! Quelle humaine peut bien lui résister ? Je suis malade. J’admire un crétin d’humain. Non. Je ne suis pas malade. Je n’admire pas un crétin d’humain. Justin est intelligent. Très intelligent. Seulement il se cache bien de montrer l’étendu de ses connaissances. De plus, il n’est pas humain. J’en suis certain. Il faut que je sache. Il faut que je comprenne d’où il sort celui-là. Je reste face à lui mais au bout de la rue j’aperçois Angela. Je suis soulagé. Je ne sais pas si Justin et Angela font bon ménage mais je les apprécie tous les deux. Pour des raisons différentes bien sûr. Angela est un ange. Justin est fascinant et intéressant. Justin semble se rendre compte qu’Angela arrive dans son dos puisqu’il me fait un signe de tête pour me saluer et s’en va en marchant tranquillement. Enfin. Tranquillement pour lui. Il ne parait pas faire un effort et pourtant son pas est rapide mais sa démarche est souple ce qui complète sa grâce. Quel être peut être doté d’autant de qualités physiques…Pas un humain en tout cas.

HJ: Je ne suis pas pressé, prenez votre temps ;P

Si j’avais suivi Masen, c’était uniquement pour le plaisir de traquer quelque chose. Ma chasse était close. Angela ne craignait plus rien. Masen non plus. Et aucune autre personne. Malgré cela j’aime chasser et suivre quelqu’un sans être vu. C’est pourquoi j’avais choisi Masen. Hasard. Wolfang restait toujours en retrait par rapport à moi mais notre discussion télépathique ne cessait guère. Lorsque le cheval s’arrêta près de l’aéroport, Wolfang me confia que l’animal cherchait la date de la catastrophe. Je me fis un plaisir de répondre à haute voix. J’aime surprendre les autres. Si je connais cette date par cœur c’est bien parce que j’ai vécu tout ça. Avec Kristen. Cette effusion de sang. Cette terreur. Ce silence ou plutôt, ma surdité sur le coup. La panique. Le feu. La fumée. La destruction. En repensant à tout cela, je ne peux réprimer un frisson. Masen me fixait. Je le fixais aussi. Puis je sentis que quelqu’un approchait et je préférai m’éloigner. Action inutile puisqu’il s’agissait d’Angela. De plus, elle m’avait vu. Elle m’avait salué. Bloqué. J’étais bloqué. Je craignais de me sentir gêné et mal à l’aise comme la première fois mais je n’allais tout de même pas fuir ? Non. Je ne suis pas lâche. J’aurai eu besoin de Wolfang pour me sentir rassuré mais il était resté dans la forêt. Loin de moi.

Un frisson me parcourut puis je revins sur mes pas. Je me rapprochais rapidement Masen ainsi qu’Angela tout en veillant à ne pas trop dépasser la vitesse humaine car je me serai trahi sans aucun doute. Je m’arrêtai près d’eux et sourit à Angela. J’espérais ne plus lui faire peur. Après tout, je n’étais plus un étranger à 100 % n’est ce pas ?

« Tu as traversé la forêt seule… ? »

Nouveau frisson. Cette fois-ci ce fut parce qu’un instant je songeai que j’aurai pu l’attaquer si elle était passé dans la forêt quelques minutes plus tôt. J’observai Masen qui mangeait une pomme. Ou plutôt, qui dévorait goulûment le fruit. Une fois de plus mon regard se porta sur Angela. Sincèrement généreuse et souriante. Agréable à vivre songeai-je avant de me mordre la langue. J’oublie facilement qu’elle peut lire mes pensées à loisir. Si je ne fais pas son éloge à l’oral c’est pour justement ne pas me sentir mal à l’aise mais je le pense…C’est pareil. Elle l’entendra. Et bien tant pis. Je suis sincère au moins.

Masen semblait lui aussi éprouver une profonde affection envers la jeune femme ce qui me fit sourire timidement. Aimé de tous. Discrète mais aimé des gens qui la connaisse.

« Je ne pensais pas te retrouver si tôt, et encore moins ici… »

Oh mes amis si j’avais pu rire en observant mes deux compagnons je ne me serai pas gêné ! Ils sont tous les deux subjugués par l’autres. Ils sont comiques. Ils sont touchants. Je suis certain qu’ils seront de bons amis. D’excellents amis même. Angela était hypnotisée par le regard magnifique de Justin. Lui était fasciné par la gentillesse de la jeune femme. Pour être honnête, elle est mignonne. Je dirais même belle. Mais mignonne convient mieux puisque c’est un ensemble. Son caractère en or et son joli physique. Tous en engloutissant ma pomme, je les observais en douce, m’amusant de ce que je pouvais constater. Les paris étaient ouverts. Lequel des deux va se jeter sur l’autre en braillant « je t’adore » ? Je pari Justin mais il lui faudra du temps. Beaucoup de temps. Mais Justin cédera à la douceur d’Angela. Foi de Masen !

Grand plaisir de voir Justin ? Quoi de plus normal ! Il est d’une beauté à couper le souffle. Sourire éclatant et attirant. Regard d’un bleu intense. Visage aux traits doux. Voix envoûtante. Rire suave. Silhouette svelte. Perfection pure.

Angela me tentait une nouvelle pomme mais Justin la fascinait tellement que je m’étais moi-même servi dans le sac donc par conséquent j’avais la bouche pleine. Me voilà embêté. Bouche pleine et Gourmandise insatiable. J’avalai ma dernière bouchée et humai l’odeur de la jeune femme. Je ne fus qu’à moitié étonné de remarquer que son odeur était légèrement mêlée à celle de Justin. Ce n’était pas la première fois qu’il se voyait.

J’eus une idée. Une idée qui allait déplaire à Justin. J’en étais certain. Je m’approchai un peu plus d’Angela et lui présentai mon dos en la poussant du bout du nez. Justin comprit et lui fit remarquer que je souhaitais qu’elle monte sur mon dos. Brave Justin. Tu es bien bête ricanai-je intérieurement. Il l’aida sans difficultés à monter sur mon dos. Je me sentis joyeux de porter de nouveau quelqu’un mais au moment où Justin s’écarta, je tentai de le retenir. Résultat je le mordis. Sa peau était glaciale. Il ne semblait presque pas avoir ressenti la morsure. Il ne réagit même pas immédiatement. Qu’est ce que tu es Justin Case…

Il me dévisagea. Oui. Oui Justin. Oui, je souhaite que toi aussi tu montes sur mon dos. Je me fiche bien que tu sois gêné à l’idée d’être tout contre Angela. Je le libérai et tentai de le bousculer d’un coup de tête mais j’eus plus l’impression de me cogner contre un mur. Le jeune homme ne vacilla même pas. Drôle d’animal notre Justin. Toujours est-il que je voulais qu’il monte sur mon dos même si pour cela je devais faire un caprice d’étalon gâté !

Enfin ! Après maints hennissements je parvins enfin à le faire grimper sur mon dos. Victoire. Victoire sur Justin Case. J’étais fier de moi. J’avais sur mon dos deux amis. Deux amis attiré l’un par l’autre. Deux amis qui en ce moment même pouvait se laisser enivrer par leurs odeurs mutuelles. Ces deux, je n’étais pas près de les lâcher. Je repris ma promenade calme. Justin était gêné d’être ainsi contre Angela. Ca se sent. Il se tient parfaitement droit. Il est nerveux. Mmhh que je suis content de moi … !

HJ : Si Angela peut répondre avant Justin, ça m'arrangerait xD Si elle veut pas, c'est pas grâve

Masen me mordit. Je ne le sentis pas tout de suite. J’aurai du dire « Aïe » comme le font les humains mais je me contentais de froncer les sourcils. Une erreur de ma part. Aucun humain ne reste silencieux lorsqu’on le mord. Lorsqu’il me relâcha, je lui adressai un regard noir en me massant doucement le bras. Foutu cheval. Par ta faute, je me trahis. J’oubliai vite puisque un autre vint se poser. Angela. Oh ce n’est pas que je l’aime, bien au contraire mais de puis près de quarante ans, j’évite tout contact avec les autres alors me retrouver tout contre une humaine qui ne me laissait pas indifférent…
Malgré cela, je finis par accepter et montai juste derrière Angela. Je n’étais pas franchement à l’aise. J’étais nerveux. Angoissé. Si jamais ma peau frôlait la sienne alors…Non. Je ne veux pas penser à toutes les questions qu’elle pourrait me poser. Il m’aurait suffi de pencher un peu la tête pour pouvoir enfouir mon visage dans ses cheveux. Je sentais son odeur délicieuse, laissant dériver mes pensées. La démarche chaloupée de Masen me berçait doucement. Elle me rassurait. Me détendait… Je fermai les yeux de plaisir, étant complètement envahis par son odeur à Elle. Je la vis fascinée par le décollage de l’avion ce qui me fit sourire.

« Il y a exactement quarante ans, un avion s’est écrasé sur le terminal de l’aéroport. Il était presque planté à la verticale. Tout a été ravagé et il y a eu des centaines de victimes. Ce n’était pas un attentat. On parle d’erreur humaine mais il faut s’imaginer l’aéroport quatre fois plus grands que ce qu’il est aujourd’hui…Il était fait du verre. Cela devait être lumineux à l’intérieur… »

Je me souviens de tout. Entièrement tout. J’avais appelé Kristen. Je l’avais hélé une fois que je la vis dans le hall et, plein de joie, je lui expliqua le changement. Tous deux nous nous penchâmes en avant, soit pour s’embrasser, soit pour quitter ensemble l’escalier – impossible à dire- car dans la fraction de seconde qui suivit, l’air fut déchiré par une explosion si bruyante que ses vibrations secouèrent les tissus mous de nos corps avant que son vacarme ne parvienne à nos oreilles. Nous fûmes expédiés à deux mètres ou plus du sol puis nous nous écrasâmes violemment à terre, comme toutes les personnes présentes dans l’aéroport, cadavres compris. Pour commencer, tout paraissait extrêmement silencieux, excepté un tintement continuel pareil à des cloches d’église. Puis, à mesure que mes yeux s’étaient habitués à l’angle singulier de ma tête, et que j’eus réussi à soulever suffisamment cette dernière afin de regarder autour de moi, il était devenu clair qu’il ne s’agissait pas du tout d’un silence, plutôt d’une incapacité à entendre, due à l’explosion. Car partout se déroulait des évènements très bruyants – bouches ouvertes sur des cris, vastes panneaux de verre dégringolant de leurs cadres tordus. Or tout s’écoulait d’une façon bien trop lente et muette.

Ce souvenir me fit frissonner et sans éprouver la moindre gêne, je vins un peu plus contre Angela, appuyant presque ma tête contre son épaule. J’avais de nouveau les yeux fermés. Je ne voulais pas me souvenir de ces horreurs. Je rouvris les yeux, préférant regarder le sol. Nous passâmes près d’une flaque d’eau où je pus admirer le reflet furtif d’Angela - Evidemment je n’apparu pas dans le reflet de cette flaque. Voilà une condition des vampires : notre image ne se reflète nulle part. Ni dans les miroirs, ni dans l’eau ni même dans le reflet d’une vitre - Pour la première fois de ma vie j’allais être franc avec moi-même : Oui. Elle me plaisait.

Angela se pencha en avant. Avait-elle mal ? Souffrait-elle de quelque chose ? Je m’apprêtai à lui demander comment elle se sentait lorsqu’elle se redressa. Ma joue frôla son cou. Elle frissonna. Malheur à moi de l’avoir toucher. Moi et ma peau glaciale. Moi et ma nature inhumaine. Je gardai le silence, ne sachant pas vraiment quoi dire. Je me sentais tout simplement bien.

Mes pensées commençaient à se perdre dans la nébuleuse de mon esprit torturé lorsque Masen prit le galop. En soi, selon ne me posa pas de soucis. Depuis ma transformation j’avais acquis un équilibre hors pair mais le problème parvint au niveau d’Angela –encore et toujours. Mon Dieu ! Que je la regardais ! -. Déséquilibrée, elle serait sans aucun doute tombée si je ne l’avais pas retenu…d’une façon étroite et rapprochée. Oui. Mes réflexes furent plus grands que ma conscience. Je l’avais pris dans mes bras. Je ne su résister à l’envie de respirer profondément son odeur ce que je m’étais interdit jusqu’à présent. Elle était attirante. Je voulais la mordre. Non. Je voulais simplement la garder contre moi pour l’éternité, donc, la mordre.

Le vent caressait mon visage. Quelle drôle de sensation que celle d’être heureux ! Mon esprit ne tournait plus rond. Du moins s’était l’impression qu’il me donnait. J’étais saoul. Saoul de cette sensation de bien-être. Lorsque Masen s’arrêta, je descendis souplement, aidai Angela à faire de même et fit quelque pas en arrière en titubant. Je levai la tête vers le ciel en souriant. Mmh j’étais drogué. J’étais drogué. L’odeur entêtante d’Angela m’avait rendu dans un état proche à celui de l’ébriété.

Je fixai les nuages qui se mouvaient dans le ciel. Le vent agita mes cheveux et je me mis à rire comme un enfant. Mais quel état… Ils vont me prendre pour un fou, j’en suis certain. Tant pis. J’aurai dû tomber en arrière à cause d’une pierre contre laquelle mon pied buta. Au lieu de cela je cessai de tituber, fermant les yeux en profitant de tout cet espace autour de moi. Je me sentais atrocement bien. Je me sentais presque humain. Il fallait que je me calme si je ne voulais pas faire peur à Angela. Oui. Je devais certainement passer pour un fou. Je rouvris les yeux et lui sourit avant de m’asseoir dans l’herbe. Masen vint s’affaler non loin de moi, se couchant en repliant ses membres antérieurs sous lui comme peuvent le faire les vaches. J’observai calmement Angela sans gêne. Oui. Je l’observai et alors ? N’avais-je pas le droit d’être attiré par une humaine ?

Peu à peu je me couchai sur le dos en observant le ciel, les mains sous la nuque. Les nuages défilaient lentement dans le ciel bleuté comme des boules de coton charriées par le vent britannique. Mon regard se perdit dans l’immensité du ciel puis je pris la parole d’une voix calme et douce comme si tout en parlant je me perdais dans mes rêves et dans mes pensées.

« Hormis les étrangers, qu’est ce qui te fait le plus peur Angela ? Qu’est ce que tu déteste le plus ? Tu m’as dit que l’idée de parler à des étrangers te donnait des frissons mais lorsque tu l’as dit, tu t’adressais à un étranger… Tu ne me connaissais pas. Ce n’est pas parce que je t’ai retenu que je suis quelqu’un de fiable… »

Je tournai la tête et la regardai en souriant avant de rire doucement en fermant les yeux. Oui. Ce n’est pas parce que je veux son bien que je suis fiable pour autant. Au contraire. Je suis dangereux pour elle. Très dangereux mais comment lui faire comprendre ? J’ai déjà essayé il me semble. Il faudrait qu’elle parte. Qu’elle parte maintenant. Et que je cesse d’aller au lycée. Comme ça je ne la verrai que très rarement voir plus du tout…et je ne lui ferai aucun mal. Je réfléchissais à l’idée sans me presser. Après tout, j’avais un peu de temps. Un peu de temps pour profiter de l’agréable compagnie d’Angela…

Justin se coucha dans l’herbe. Je fis de même. Je me reposais tout en écoutant avec attention leur discussion. Je ne m’inquiétais pas. Quoi que fut Justin, il ne représentait pas un danger immédiat. De toute évidence, il était trop attaché à Angela pour lui faire le moindre mal. J’étais confiant. Je regardai Angela. Puis Justin. L’un couché. L’autre assise. Voilà deux opposés qui s’accordent à merveille. Angela est douce. Gentille. Attentionné. Délicate. Attentive. Touchante. Innocente. Ingénue. Justin est sombre. Cruellement beau. Indifférent aux autres. Mystérieux. Intelligent. Attirant et terrifiant à la fois. Son cœur est fait de glace. Mais cette glace fond peu à peu face à Angela.

Ce que je souhaite te faire comprendre ma douce Angela ? Que Justin n’est pas humain ! Tu passes à côté de détails flagrants. Détails révélateurs. Je ne t’en veux pas. L’amour rend aveugle. Je ne sais pas si c’est de l’amour mais je sens très bien que Justine t’attire autant que tu l’attires. Prends garde malgré tout. Justin est la tentation même. Le désir interdit. S’il n’est pas humain, cela n’ira pas. Si tu l’apprends, tu auras peut-être peur de lui mais tu continuera à être fascinée. L’amour et la peur ne vont pas ensemble. Dans le cas contraire, c’est lui qui craindra quelque chose. Les esprits humains sont complexes, il ne faut surtout pas les brusquer c’est pourquoi je ne mets pas tout en œuvre pour t’avertir Angela. Sache que je te préviendrai en temps et en heure quand il s’agira du bon moment.

Regarde Justin. Là. Maintenant. Maintenant qu’il a fermé les yeux et qu’il est silencieux. N’a-t-il pas l’air d’un doux agneau ? N’importe quelle fille saine d’esprit aurait envie de se glisser dans ses bras et de lui murmurer des mots au creux de l’oreille lorsqu’il est ainsi. Il est plus attirant. Encore plus. Mon Dieu quel être ! Je vais devenir un fervent admirateur.

Justin rouvrit ses yeux fascinants. Semblables à deux larmes de l’océan. Lorsqu’il regardait le ciel, on pourrait croire que l’azur se reflète dans son regard. Spectacle impressionnant. Il a l’air détendu. Pour une fois qu’il l’est, c’est Angela qui garde une certaine distance avec lui. Qu’ils sont compliqués ! Allons Angel ! Pourquoi cette distance ? Il ne va pas te manger ! Enfin je pense… Il ne demande que ça ! Hurmf. Tu me déçois un peu. Enfin, je ne peux pas te jeter la pierre. Je sais que les Humains et les sentiments, ça prend du temps à s’accorder.

Leur conversation porta sur la peur et j’appris celles d’Angela. Rien de m’étonna. Puis elle demanda à Justin s’il craignait quelque chose. J’étais curieux d’en connaître la réponse tiens…De quoi à peur notre Justin Case…

« Non. »

Ma langue fut plus vive que mon esprit. Juron interne. Je devais me reprendre au plus vite et je devais surtout réfléchir pour me dénicher une peur réelle pour ne pas être obligé de mentir à Angela. Oh mais quel imbécile. Ne puis-je donc pas réfléchir avant de parler ? Action. Ou Réaction plutôt, déraisonnable. J’inspirai profondément et fermai les yeux avant de mettre la main sur une idée. Oui. J’avais une réponse à donner à Angela. Ouf.

« Enfin si…J’ai peur de faire souffrir quelqu’un. De faire involontairement du mal. Pas à n’importe qui. A une personne précise. Les autres ne m’intéressent pas. Je ne me soucie pas de leur vie tant qu’ils ne viennent pas déranger la mienne. Je vais passer pour un idiot ou pire, un fou. J’ai peur de moi-même. »

Je rouvris les yeux, regardant paisiblement Angela. Je ne lui avais pas menti. J’ai peur de ce que je suis. De ce je peux faire. De mon instinct. Du danger que je représente. Malgré cet aveu, j’étais des plus serein comme s’il s’agissait là d’une chose banale et sans bien grand intérêt. Je la regardai tout en restant couché dans l’herbe.
N’ayant plus rien à dire, je me mordis nerveusement les lèvres sans pourtant vraiment ressentir la douleur. Il fallait que je me méfie. J’étais capable de me mordre jusqu’au sang sans même en avoir conscience. L’air se rafraîchissait mais ça non plus, ça ne risquait pas de m’atteindre.

Je fermai de nouveau les yeux, appréciant le calme, le vent et la présence d’Angela. Je m’étais rarement senti aussi calme. Aussi relaxé. C’est peut-être parce que je ne suis jamais venu chercher la tranquillité dans les prés ? Ou bien parce que j’étais en bonne compagnie. Ou bien encore parce que je m’étais avoué à moi-même qu’Elle m’attirait. Je ne sais pas. Je ne saurai certainement jamais.
Je soupirai doucement d’aise et lorsque je rouvris les yeux, je regardai calmement Masen qui me fixait. Avais-je fait ou dit quelque chose qu’il ne fallait pas ? Perturbé, je préférai tourner la tête vers Angela et esquissa un sourire. J’avais si peur de faire du mal à l’être doux et fragile qu’elle est…Je ne voudrais surtout pas faire de mal à cet ange mais comment faire avec ma nature si peu…humaine…

Je fis taire mon esprit qui tentait de me mettre en garde contre quelque chose pendant qu’Angela prenait ma main. Je n’avais pas bougé. Je n’avais pas ouvert les yeux. Sans doute fus-je trop confiant puisque qu’Angela osa un geste qu’elle n’aurait jamais du faire. Heureusement pour elle, mon esprit et mon corps sommeillaient sinon j’aurai pu lui faire mal. Mon premier réflexe aurait été de la saisir sans douce et je lui aurai brisé un ou deux os par ce simple geste.
En temps normal je me serai relever d’un bond en grondant d’une voix sourde un truc du style « Pourquoi tu as fait ça ! » ou encore « Ne t’avise plus de me toucher » mais au lieu de cela, je me contentai de me redresser, stupéfait. J’ouvris la bouche pour répliquer quelque chose mais je ne sus pas quoi dire. Je préférai me taire et je refermai la bouche. Mon Dieu elle avait osé. Elle avait osé mais elle n’aurait pas du ! Je ne suis pas humain ! Je n’ai pas le droit de m’éprendre d’une humaine ! Je ne peux pas ! C’est contre nature…

Elle s’empourprait et moi je restai là, surpris et déstabilisé. Cela avait été plus fort qu’elle ? Je ne pouvais pas être attiré à ce point tout de même ! Parfois je songe que j’aimerai pouvoir me voir dans un miroir pour comprendre la réaction de certaine. Je jetai un coup d’œil à Masen qui jubilait. Toi, la ferme le poney orange. Je ne veux pas de tes commentaires, merci.

Je me levai et allai m’asseoir près d’Angela. Je la regardai, gêné, ne sachant pas comment faire pour la calmer dans ses excuses. Hormis le fait que j’eusse eu l’impression de recevoir une décharge électrique, ce n’avait pas été désagréable comme sensation. Nerveux je passai une main dans mes cheveux puis la forçai doucement à me regarder dans les yeux en l’obligeant à tourner la tête vers moi.

« Tu devrais avoir peur Angela. Tu devrais. Je suis dangereux pour toi. Je suis dangereux pour tout le monde mais les autres je n’en ai rien à faire. Je ne veux pas qu’il t’arrive du mal…Surtout par ma faute…Comprends-le…S’il te plaît…Si je deviens trop proche de toi cela risque de virer à la catastrophe, de virer au cauchemar…Tu es adorable. Tu es angélique mais je ne veux pas te porter de préjudice. »

J’hésitai. Je me jugeai moi-même. J’évaluai si j’étais capable de ce geste sans être surpassé par mon instinct. Je restai silencieux. Pour moi, le temps de cette réflexion dura une éternité mais en temps humain cela dut représenter à peine une dizaine de seconde. Je me penchai sur elle et embrassai doucement ses lèvres tièdes. De nouveau cette impression d’électrochoc. Je rouvris les yeux qu j’avais fermé en posant mes lèvres sur les siennes. Je me redressai doucement et la suppliai du regard.

« Soyons amis…s’il te plait… »

* Je ne suis pas certain de pouvoir maîtriser une force et un instinct ancestral qui coulent dans mes veines sans que tu ne soupçonnes quoique ce soit. En toute sincérité, tu m’attires fortement mais je suis trop dangereux pour l’instant…Peut-être…Plus tard…Pardon…Je vais paraître déplacé et mal élevé mais tes lèvres sont délicieuses… *

Angela sembla peiné par les paroles de Justin mais elle les accepta. Dans un sens, j’en voulais profondément à ce pauvre abrutit, dans l’autre, je sentais que sa douleur était semblable à celle d’Angel. Justin nous quitta après nous avoir timidement dit au revoir. Pour ma part je raccompagnai la jeune femme jusque chez elle avant de partir à mon tour de mon côté.
Les jours qui allaient suivre promettaient d’être chargé en sentiment…