La pluie. Le froid. Les cours. L’ennui. Les Humains. Justin.

La pluie. Le froid. Les cours. L’ennui. Les Humains. Justin. Voilà ce qui envahissait mon esprit à cet instant. Je passais d’une chose à une autre. Je désirai tuer chaque humain avec qui je me retrouvais dans les salles à chaque heure de cour. La pluie mouillait mon visage angélique ce qui me fit reculer à l’abri de l’avancée du toit. L’ennui parce que les cours n’avaient aucun intérêt pour moi. Heureusement que je ne suis pas très grande et que je ne fais pas mon âge…Il me suffit de dire que j’ai 19 ans, que j’ai redoublé deux classes ou trois, je ne me souviens pas bien du mensonge que j’ai du broder pour entrer dans ce lycée. C’était stupide de ma part. C’était mon seul espoir de retrouver Justin, le vrai. Peine perdue. On se voit, on se parle un peu c’est vrai…Enfin c’est surtout moi qui lui parle, lui marmonne ou mieux encore, ne réponds rien. Je crois qu’il m’en veut encore pour tout ce qui s’est passé. C’est vrai, je n’aurai pas du passer la nuit avec lui, je n’aurai pas du le mordre, je n’aurai pas du l’abandonner. Je n’aurai pas du et pour je l’ai fait. Je le voyais d’abord. Il entrait dans la cour, faisant tourner quelques têtes. Oui. Justin était devenu beau. Et sombre et mystérieux. Ce n’est pas déplaisant à voir, enfin pour mon avis. Justin, je l’aime, vraiment, mais pour une profonde amitié, pas autre chose. Un soupire s’échappa de mes lèvres et je souris en voyant que même s’il était d’humeur noire, il venait à moi. Vampire ténébreux, il l’était.
- Justin…Comment tu te sens aujourd’hui ?
Tentant un approche, je posai une main sur son épaule mais il se dégagea sans un mot, fixant devant lui sans bouger. Sans rien dire. Oh Justin tu me fais de la peine… Il était trempé. Ses cheveux, agité par le vent glacial, n’avaient aucun ordre, comme d’habitude. Il avait du courir sous la pluie pour être dans cet état…Il aime courir. Courir pour fuir, pour oublier, pour ne penser qu’à sa respiration régulière. Justin excelle en tout. En tout sauf en expression des sentiments. Il aime l’art aussi. Il adore ça. Il est un excellent peintre et moi j’aime le prendre en photo. Il est photogénique sans l’ombre d’un doute. Quelque soit son état, les photos sont toujours magnifique. Qu’il soit en colère, triste, en train de rire ou pleurer, Justin est beau en photo. Il fait parti de ces gens agréable à voir… En regardant dans la main direction que lui, je souris en apercevant Elie. Voilà mon aide, ma bouée de sauvetage…

J'arrivai peu après Justin et Wolfang. C'était devenu une habitude. Ils étaient plus rapides que moi et je n'étais jamais pressé de gagner le lycée. Les cours allaient commencer dans une petite dizaine de minutes ce qui me laissait encore du temps pour discuter avec les autres. En arrivant, je fus gratifié d'un sourire plein d'espoir de la part de Kristen. Je la comprenais. Justin refusait de lui parler depuis déjà plusieurs mots. Il préférait rester silencieux et en retrait ce qui ne m'étonnait plus vraiment. Il souffrait, j'en était certaine seulement Justin ne fait pas parti de ces gens qui aiment étaler leur vie donc par conséquent on ne savait jamais ce qu'il ressentait ou pensait. Dommage car je serai curieuse d'en connaitre un peu plus sur lui. De plus, il est magnifique ce qui est perturbant au début. Je me souviens de notre première rencontre. J'avais perdu pied. Mes joues s'étaient enflammées. Quelle honte avais-je eu ! Et cela l'avait fait rire...Son rire m'avait mis un peu plus mal à l'aise car, par stupidité je lui avais fait remarqué qu'il avait une voix suave et agréable. Cela m'avait echappé. Depuis, je l'admire toujours mais en me mordant la langue pour ne rien dire. Il ne fait pas attention à moi, je le sais. Nous sommes de bons amis. Rien de plus. Tant pis pour moi...Mais j'espère qu'un jour, une autre fille osera lui parler et de nouveau il rira...Cela faisait si longtemps que je ne l'avais pas entendu rire ou vu sourire... Il m'inquiètait sincérement. Pauvre Justin..Que t'arrive-t-il... Je tentai de l'embrasser sur la joue pour lui dire bonjour mais il tourna la tête. Nous nous retrouvâmes nez à nez et il m'adressa un regard peu amène.
- Pardon...Enfin, bonjour quand même...
Il me répondit d'un simple regard compréhensif. Enfin un peu d'humanité.
- Merci...
Il ne sembla pas comprendre ce qui me fit sourire. Justin. Justin l'innocent. Justin le ténébreux. Le Parfait Justin. Je ris et me mit à discuter tranquillement avec Kristen. Nous ne faisions plus attention à Justin car nous savions qu'il n'aimait pas ça. Nous lui tournions le dos.

Angela se réveilla doucement de son profond sommeil. Elle était encore trempée de sueur, surement parce qu'elle avait fait un autre cauchemar. Il lui arrivait souvent de faire des cauchemars depuis qu'elle était arrivé à Luton, mais c'était peut être parce qu'elle n'était pas complètement habitué à la ville encore, même après deux ans... Bon on en étais-je rendu ? Ah oui, le réveille. Angela se leva de son lit et regarda par la fenêtre. Encore de la pluie ? Et bien au moins cette fois elle pourra s'apporter un parapluie et se mettre des vêtements plus, dites, appropriés pour les jours de pluies. Mais avant tout, elle devait écrire la lettre pour son meilleur ami Thomas sinon elle allait encore oublier à nouveau.

Donc, toujours en pyjamas, elle se prit un crayon plomb, une feuille blanche de sa valise d'Art plastique et posa le tout sur son bureau. Elle commença à écrire..:

Cher Thomas,
Pour ma part, il pleut toujours à Luton. Par contre, hier il eut un peu de soleil, mais juste en soirée, près de l'heure du souper. De plus, tu ne devineras jamais qui j'ai rencontré hier! Tu donnes ta langue au chat ? J'ai rencontré l'ami le plus extraordinaire, mise appart de toi bien sûr. Il se nomme Masen... et il est un étalon. Mais il n'est pas juste n'importe quel étalon, non celui-ci était spécial. Il me comprenait et moi je le comprenais aussi! Bon moi je dois y aller, faut que j'aie le retrouver. Je t'adore Thomas et j'espère qu'il fera soleil ici aussi!

-xxx- ton amie Angie.


Elle se sortit une enveloppe de sa valise et plia la lettre en quatre avant de l'insérer dans l'enveloppe. Elle la referma doucement, puis elle inscrit l'adresse avec un crayon à l'encre. Lorsque le tour fut jouer elle déposa sa lettre dans son sac et alla s'habiller. Elle se mit un chandail brun, à manches longues, et un veston beige. La jeune femme portait également une paire de jeans noirs et un chapeau bruns foncé. Comme chaussures, elle se mit des bottes de cuir avec de petits talons, ainsi que l'eau n'allait pas les mouillés et si elle aurait à marcher dans l'herbe elle n'allait pas tomber et se fouler une cheville.

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Angela était allé posté sa lettre puis elle décida d'aller faire un tour dans la cour extérieur du lycée. Elle portait son parapluie dans sa main gauche et un sac autre sac dans son autre main. Ce dernier était remplit de trucs ronds qui semblaient comme des fruits. Des pommes... surement pour Masen. La jeune femme arriva à la cour et y découvrit qu'il y avait déjà des personnes toutes aussi mystérieuses l'un de l'autre. Aussitôt elle aurait tenté de partir, puisqu'elle ne supportait pas le regard des autres, mais lorsqu'elle aperçu le jeune homme de l'autre jour elle figea, ne sachant plus quoi faire. Elle s'était promis d'aller faire sa rencontre, mais peut être devrait-elle faire sa rencontre une autre fois, lorsqu'il y aurait moins de monde ?... Angela s'isola dans un coin de la cour, non loin du banc ou le jeune homme était assit, et regarda le paysage, posant son sac de pommes à ses pieds. La jeune humaine pensait à nouveau à Masen, ne sachant plus comment retirer son image de sa tête. Elle avait rêvé à lui... Il se faisait tuer, par un loup... un loup blanc, celui du jeune homme. D'ailleurs, c'était le jeune homme qui avait donné l'ordre de le tuer, tandis que la jeune femme ne pouvait que regarder. Elle pouvait sentir sa douleur...
La jeune femme posa sa main sur sa poitrine, comme si son cœur lui faisait mal, mais la brève douleur passa tout aussi rapidement qu'elle était venu. Elle retrouva le sourire et reporta son attention sur ceux qui était dans la cour...

Comme tous les matins, à sept heures précise, le réveille vient perturber le silence si agréable et reposant qui régnait jusqu’alors dans ma chambre. Ce son si désagréable à mon oreille l’est d’autant plus quand je n’ai pas eu la dose de sommeil dont j’ai besoin, comme c’est le cas aujourd’hui. Ma main lourde et indélicate cherchait à tâtons sur la table de nuit la cause de ce bruit insupportable pour l’arrêter au plus vite. D’un violent coup, j’envoyais valser l’objet à l’autre bout de la pièce. Ce n’était pas dans mes habitudes, heureusement, mais le manque de sommeil peut me rendre de très mauvaise humeur, même lorsque tout est de ma faute, comme c’était le cas aujourd’hui. J’aurais du être raisonnable hier soir et ne pas trop abuser de la gentillesse de ma lampe de chevet qui ne m’a lâchée qu’à une heure très avancée de la nuit. Je perds toute notion du temps une fois plongée dans un livre qui m’accroche particulièrement.

Avant même d’ouvrir les paupières, je sus qu’il pleuvait, non seulement parce que la pluie et l’humidité sont monnaie courante dans cette ville, mais aussi parce que je remarquais que le bruit des gouttes qui la veille m’avait bercé n’avait pas cessé. J’en ai eu la confirmation en m’approchant de la fenêtre. Dehors tout était gris, il faisait froid, et pourtant cette atmosphère maussade pour la plupart avait suffit à me rendre mon calme habituel. Cela peut paraître bizarre, mais le clapotis régulier des gouttes d’eau, la légère bise qui semblait donner vie à tout ce qui se trouvait sur son passage, de la grande branche qui agitait ses feuilles à la petite touffe d’herbe qui se pliait dans une sorte de révérence comme pour montrer au vent tout le respect qu’il lui impose, tout cela était reposant pour moi. Je m’attardais sur ce spectacle apaisant, trop d’ailleurs, ce qui me mis en retard par rapport à d’habitude.
Je pris une douche rapide et avala la première chose qui se trouvait à porter de main – ici une clémentine que j’épluchais en vitesse avant de la manger rapidement. J’ai toujours eu une sainte horreur des gens qui ne sont pas à l’heure et aujourd’hui, c’était mon tour de ne pas respecter les horaires. Je me pressai davantage et avec de la bonne volonté, je finis par sortir de chez moi à l’heure habituelle.

Mon unique moyen de transport est la marche à pied. Bien sûr je pourrais me servir des transports en commun, seulement je préfère prendre mon temps et utiliser ce que l’on m’a donné à ma naissance : mes deux jambes. Il faut bien qu’elles me servent après tout, à moi qui ne suis pas une sportive dans l’âme. C’est donc à ma vitesse que je suis arrivée au lycée, qui, comme chaque matin, était déjà rempli par la majorité des élèves. J’étais trempée, n’ayant pas pris la peine de me munir d’un parapluie avant de m’aventurer dehors, mais cela n’avait aucune importance. Tout de même, pour ne pas empirer l’état dans lequel j’étais – je devais être belle les cheveux plaqués sur le crâne avec des gouttes qui ruisselaient le long de mon nez et de mes joues, je me mis à l’abri et sortis un livre que j’eu tôt fait de ranger puisque les cours n’allaient pas tarder à commencer. En attendant, je me laissais aller à écouter les conversations autour de moi sans pour autant y prendre part. Je fixais mon attention sur un chien, Le chien qui suivait toujours cet étudiant dont je ne connaissais que le prénom : Justin.

Malgré ma discussion avec Elizabeth, je surveillais Justin du coin de l'oeil, espérant, priant, pour qu'il ne commette aucun excès de rage comme il en est capable. Je sais que les autres jeunes l'énervent. Les Humains l'énervent par leur comportement. Inquiète à la base, je le devins encore plus lorsqu'il sembla perturbé par quelque chose. Il fixait une jeune fille plutôt mignonne pas loin de lui. Mon Dieu, dîtes moi qu'il n'a pas soif. Dîtes moi qu'il ne la regarde pas comme ça puisqu'il veut goûter à son sang. Je vous en supplis. Je faillis me jeter sur lui lorsqu'il se leva d'un bond. J'ai cru qu'il allait la tuer, j'en étais certaine. J'étais terrifié. Justin ne fait pas de bêtise, je t'en supplie...Justin. Je me mordai la lèvre inférieur mais fut rassurée lorsque je compris qu'il ne fit que rattrapper cette jeune fille pour éviter qu'elle ne tombe. Ouf. Détendue je regardai une élève près de moi. Elle fixait le chien de Justin ce qui me fit sourire. Je m'approchai silencieusement d'elle et lança d'un ton apaisé et doux.
- Il s'appelle Wolfang...Le chien de Justin s'appelle Wolfang.
Elle me dévisagea. Quoi de plus normal. Quoi de plus Humain.
- Je m'appelle Kristen. Kristen Rosoff. Je suis, enfin j'espère toujours l'être, une excellente amie de Justin
Par ces tempis-ci, il m'arrivait de douter. Je ne le lui en voulais pas . Je le comprenais parfaitement même. Si la jeune humaine fixait Wolfang, soit elle avait peur, soit il la fascinait. Je n'aurai su dire ce qu'elle ressentait vraiment.
- Excuse moi de t'avoir abordé ainsi...Maintenant tu pourras mettre un nom sur ce chien...

Je vais manger désolé

Il me fallait une explication. Et une bonne. Sinon j’allais passer pour un monstre ou un fou qui la traque depuis des mois ou je ne sais quelle image peu plaisante encore. Tout en réfléchissant rapidement, je lui assurai qu’elle pouvait me tutoyer. J’étais plus vieux, d’une ou deux années, enfin, d’apparence, mais ce n’était pas une raison pour me tutoyer car de toute façon, nous sommes très certainement dans la même classe à un ou deux cours.

-Hier soir tu étais au stade avec le cheval, Masen il me semble, et tu lui as dit ton prénom au moment où nous passions, mon chien et moi. Je l’ai entendu, je suis désolé.

Cela aurait pu être vrai car la veille elle avait parlé à Masen – évidemment que je savais qu’il s’appelait ainsi mais cela aurait paru étrange si j’avais été sûr de moi – et elle avait dit son nez, je l’avais entendu mais au moment où elle l’a dit j’étais à plus de dix mètres d’elle. Aucun humain n’a une telle ouïe à ma connaissance.

J’avais senti l’odeur de la peur. Elle avait peur. Pourquoi ? Avais-je l’air agressif ? Cette pensée me déstabilisa brusquement et pendant un bref instant, une expression de surprise et d’incompréhension se peignit sur mon visage à la peau douce et laiteuse. Je me ressaisis, effaçant cette émotion de mon visage pour lui offrir un sourire franc. Je n’avais pas soif. Je ne lui voulais aucun mal et pourtant elle avait eu peur. Peut-être n’aurais-je pas du la rattraper ? Le doute s’insinua dans mon esprit mais je le fis taire.

Elle avait reculé. Mal à l’aise j’avais moi aussi fait un pas en arrière. En vérité je me sentais gêné d’être en face de quelqu’un que je ne connaissais pas. Elle était jolie, c’est vrai, mais elle était Humaine et c’est sans doute ça qui me désarçonnait le plus. En temps normal je ne touche pas les humains, je ne les aide pas, je ne les retiens pas, je les ignore. Mais tout ça c’est en temps normal. Là les choses sont différentes. Non ?

Je me sentais maladroit. Mal à l’aise. Je ne savais pas m’y prendre. Elle avait eu peur et maintenant c’était mon tour. J’avais peur de lui faire peur. Peur qu’elle parte en courant. Peur de passer pour un fou. Un monstre.

« Je m’appelle Justin. Justin Case…Excuse moi si je t’ai fait peur…Je suis vraiment désolé… »

Je la regardai une dernière fois en m’excusant et allai m’asseoir sur le banc, lui laissant la place si elle voulait venir. Sinon tant pis.

* Je ne suis qu’un imbécile. Un pauvre type stupide…Un crétin.*

Elle avait lu dans mes pensées. Je ne m’énervai pas. Je ne lui en voulais même pas. Au contraire. Elle me fit rire. Rire sincèrement et sans retenu ce qui dévoila ma dentition aux allures parfaites. Contrairement à toutes les légendes je n’avais des crocs qui sortaient de ma bouche. Heureusement. Juste deux canines qui dépassent légèrement le reste de ma dentition. A peine un ou deux millimètres de plus que les autres dents. Il est vrai qu’elles sont un peu pointues, mais rien de choquant ce qui nous permet, à nous les vampires, de nous mêler parmi les humains sans être découverts. Pourquoi m’avait-elle fait rire ? Juste par sa réaction. Elle avait posé sa main sur sa bouche comme si elle avait dit quelque chose qui ne fallait pas. Non. Moi cela ne me dérangeait pas plus que cela qu’elle puisse lire mes pensées car Wolfang aussi les lisait.
En toute sincérité, j’étais même heureux qu’elle puisse lire mes pensées. Cela pourrait me permettre de lui dire des choses sans ouvrir la bouche ce qui m’arrangeait car Kristen me surveille tellement qu’elle allait finir par trouver étrange que je parle autant à une fille. A une Humaine. Heureusement, avec le temps, j’avais appris à bloquer une partie de mon esprit. Ainsi Angela ne pourrait pas apprendre tous mes secrets. Et surtout tout mon passé. Non. Elle n’a accès qu’à ce que je pense dans l’immédiat. Heureusement…

J’avais l’impression que nous jouions. Lorsque ce n’était pas l’un qui était mal à l’aise, c’était l’autre comme si nous échangions mutuellement notre gêne. A cette idée je me détendis, cessant d’être gêné. Oui. Après tout ce n’était qu’une humaine. Une humaine qui lisait mes pensées. Mais une humaine quand même.
Je la gratifiai d’un sourire doux, espérant que son malaise se dissiperait aussi vite que le mien. Ne voulant pas les déranger avec des mots inutiles, j’observai avec amusement le parapluie qui me protégeait à présent. Je souris de nouveau. Il fallait que je fasse attention. J’allais finir par être de bonne humeur ce qui n’était pas arrivé depuis environ vingt ans. Je l’observai calmement. Sans un mot. Elle avait quelque chose dans son attitude qui me donnait envie de rire. Pas de me moquer. Juste de rire. Peut-être était-ce dans son attitude ? Lorsqu’elle s’était tourné vers moi elle avait eu l’air si déterminé à me faire changer d’avis sur moi-même…Oui cela devait être ça qui m’amusait. Sa détermination. Sa franchise. Son impulsion. Elle avait parlé avant de réfléchir. Oui mais voilà, je ne suis pas humain et je sais que certaines personnes ont ce genre de dons. Après cinquante-huit ans d’existence, je connaissais cela sans m’en étonner.

« Merci. Tu me protèges avec ton parapluie et en plus tu viens me dire que je ne suis pas stupide. Tu sais, je ne suis pas dur avec moi mais juste exigeant. J’ai des habitudes et je n’aime pas les perdre. Je ne m’étais jamais retrouvé aussi mal à l’aise face à quelqu’un ce qui est plutôt stupide de ma part car tu as l’air douce et gentille, alors pourquoi ce malaise ? Pour ce qui est de mes pensées, sache que ça ne me dérange même pas…Tu as quoi comme court après Angela ? »

L’enthousiasme dont avait fait preuve Angela me fit rire de nouveau. Elle devait prendre à cœur les cours. Moi aussi j’aimai apprendre mais maintenant, j’étais presque lassé de traîner encore au lycée. Je savais beaucoup trop de chose. Je connais par cœur tout mes cours et pourtant je viens toujours ici. C’est la seule chose qui m’empêche de vivre exclusivement enfermé sur moi-même peut-être ?

- Biologie, j’ai des cours d’arts comme toi, évidemment, français, mathématiques, anglais. Ainsi que l’Histoire de l’art. Je pense en avoir oublier. En réalité, j’ai presque les même cours que toi. Et du sport. Je...Je ne t’ai pas fait mal tout à l’heure en te rattrapant ?

Je frissonnai doucement d’appréhension car j’aurai très bien pu lui faire mal. Depuis combien de temps n’avais-je pas toucher un humain ? Je n’ai que de contact physique qu’avec Wolfang et parfois Kristen mais elle…Elle s’est pour la secouer lorsqu’elle m’énerve ou la repousser sans ménagement. Elle est comme moi de toute façon. Elle ne craint rien. Tandis que les humains sont si…Je regardais Angela et esquissai un sourire. Si fragiles.

Pour ce qui est des cours, je n’ai pas menti. Je pense sincèrement en avoir oublier mais cela commence à faire pas mal d’année que je suis ici. Comment ne pas confondre ? Par exemple, je n’aurai su dire si le cycle dernier j’avais fait du grec ou si c’était cette année. Cela ne m’affolait pas. Mes cours sont tous notés quelque part. J’aime être organisé.

Je regardais Wolfang qui se coucha calmement sous la pluie, pas loin du banc. Il bailla. Il aimait l’eau sans aucun doute ce qui était un avantage car sinon, il ne m’accompagnera jamais au lycée. A Luton il doit pleuvoir trois cent soixante jours sur trois cent soixante cinq.

- Si je peux te donner un conseil : garde tes distances avec Kristen. C’est la fille là-bas avec les cheveux noirs. Elle n’est pas méchante. Pas du tout même. Mais disons qu’elle est assez spéciale et elle a un goût prononcé pour la vengeance donc mieux vaut être son allié que son ennemi…

*Tu as vraiment l’air gentille, je ne voudrais pas qu’il t’arrive quelque chose dans ce genre..*

Je fermais les yeux en glissant mes doigts dans mes poches. Je savais qu'elle lisait mes pensées. Je savais qu'elle entendrait ce que je venais de penser. C'était voulu. Elle avait ce don ? Autant l'utiliser à bon essient. Je ne bougeais pas, silencieux. J'écoutais les conversations de toute la cour. Rien de bien passionnant. Discussions Humaines tout simplement. Je n'avais pas froid. Je n'avais jamais froid. Parfois j'oublie que les Humains sont sensibles à la chaleur et je viens au lycée en t-shirt alors qu'il pleut. Cela m'est arrivé une ou deux fois déjà mais depuis un certain temps je me méfie particulièrement des Humains. Je ne souhaite pas être soupçonné. C'est pourquoi aujourd'hui j'ai opté pour la veste sombre mais le chandail bleu. Wolfang aime se moquer. Je le sais. Je l'entends dans ses pensées. Ce qui le fait rire c'est ce bleu qu'on retrouve toujours quelque part chez moi. Que ce soit dans mes yeux ou dans le chandail. Ce bleu est l'unique chose que j'ai gardé de ma mère. Elle ne me manque pas. C'est triste à dire. Elle ne me manque pas mais je la respect.

Je fus surprise de voir la jeune femme s’approcher de moi sans raison apparente, tout du moins pour moi. Bien évidement, je la connaissais, mais de vue seulement. Comment ne pas la remarquer alors qu’elle était d’une beauté incomparable, qu’on pourrait même qualifier d’irréelle sans vraiment savoir pourquoi ? Toujours est-il que je ne compris pas immédiatement pourquoi elle s’était approchée de moi alors que je ne l’y avais pas invité explicitement, enfin je ne pense pas.
Lorsqu’elle m’apprit le nom du chien, je sentis le rouge me monter aux joues. Je ne m’étais pas rendue compte à quel point mon regard était insistant, mais je n’aurais su dire pourquoi ce chien me fascinait. Il n’avait pourtant rien qui pouvait le différencier d’un autre animal de la même espèce. Peut-être captait-il mon attention tout simplement parce qu’il le seul chien à accompagner son maître au lycée.

« Enchantée Kristen, moi c’est Lisey, Lisey Scott. Inutile de t’excuser, tu ne m’as pas dérangée. »

J’avais remarqué la tension presque palpable qu’il y avait entre elle et le jeune homme qui les avait rejoints, le fameux Justin dont elle venait de me parler. Je devais avouer que je n’ai pas vraiment saisi pour quelle raison elle l’avait inclus dans sa présentation, alors qu’elle me déclinait son identité, comme si cette fréquentation avait pu changer l’opinion que je pouvais avoir d’elle au premier abord. Le ton sur lequel elle l’avait dit m’a laissé penser qu’elle tentait plus de se convaincre elle-même qu’autre chose.

« Ce Justin dont tu parles, c’est bien le propriétaire de Wolfgang ? Pourquoi l’emmène-t-il avec lui en cours ? »

Je n’avais rien trouvé de mieux à dire, l’interrogeant sur le sujet que je trouvais le moins risqué. Pourtant des questions j’en avais, car il est vrai que, bien qu’elle s’était efforcée de le cacher tant bien que mal, j’avais senti que Justin semblait être un sujet délicat pour elle. J’aurais aimé savoir pourquoi, mais la curiosité est un vilain défaut, d’autant plus que je n’avais jamais adressé la parole à Kristen avant qu’elle ne vienne me voir ce matin.
Je savais que Kristen me prêtait attention, mais cela ne l’empêchait pas de regarder nerveusement en direction de Justin. il était assis à côté d’une jeune femme blonde que je ne connaissais pas. Ils avaient l’air de bien s’entendre et un rapide coup d’œil à Kristen me confirma ce que je pensais : elle était tendue. Par politesse, je fis mine de ne rien avoir remarqué et posa mon regard à différents endroits de la cour, ne m’attardant jamais sur une personne en particulier. Je n’ai jamais aimé fixer les gens. Je trouve cela très impolis et plutôt déstabilisant. Je n’aime pas mettre les gens mal à l’aise et je n’ai aucune envie de m’attirer des problèmes – certaines personnes réagissent plutôt violement quand ils se sentent observé, je parle par expérience. Wolfgang a été l’exception à la règle.

Je me raidis lorsqu’elle utilisa l’expression « Ce Justin ». Le respect était-ce vraiment trop dur pour les humains ? Ils sont exaspérant sur certains points mais je ne peux pas leur en vouloir, ils sont eux-mêmes.

« Oui mais on ne peut pas dire que Wolfang appartient à Justin. Ils sont comme deux bons amis si tu me suis…Je n’ai jamais sût si c’était Justin qui emmenait Wolfang ou l’inverse. Justin s’ennui ici. Pas besoin de le connaître pour le voir. C’est à se demander ce qu’il fait au lycée donc peut-être que c’est plus Wolfang qui l’y emmène…Le chien ne quitte jamais le maître et vice-versa…Justin n’est rien sans Wolfang. »

Brusquement Il releva la tête, m’adressant un regard qui me conseillait de me taire. Je sais Justin. Je sais. Je sais que tu écoutes les conversations de toutes les personnes dans la cour. Je sais que tu n’aimes pas quand je parle de toi mais comprends moi. Cela fait maintenant presque trente-cinq ans que j’ai le cœur lourd d’avoir brisé le tien. J’ai besoin de parler de tout ça à quelqu’un Justin. Et tu fais parti de l’histoire. Tu en es le personnage principal donc oui, un jour je parlerai beaucoup de toi. Un jour où j’aurai quelqu’un à qui je ferais confiance. A cette même personne je montrerai peut-être aussi les clichés de toi. Même humain tu étais beau mais tu t’en fichais plus que tout. Je t’aimais à ma façon. Ca t’a blessé. J’aimerai pouvoir te serrer contre moi comme avant mais la dernière fois que j’ai tenté ça, tu n’as pas apprécié.

Je soupirai, triste d’avoir perdu mon Justin. J’avais l’impression d’avoir seize ans et d’avoir perdu mon petit copain. J’avais vraiment cette sensation ce qui m’agaçai. Justin n’avait jamais été mon petit copain. Mes seize ans remontaient à il y a longtemps. Je suis sotte.

« Excuse moi…Je ne me sens pas très bien… »

Je frissonnai, m’appuyai au mur et me laissai glisser le long de ce dernier. Une fois assise par terre, je me sentis réellement vulnérable. Je ne pouvais m’empêcher de le fixer. J’avais envie de pleurer mais je ne pouvais pas devant autant de gens.

« Dit moi Lisey, tu as déjà perdu quelqu’un de cher ? »

Je frémis doucement lorsqu’elle rit. Son rire était si doux et si sincère…Cela faisait si longtemps que je n’avais pas entendu de rire si innocent. Je la regardai, calme puis sourit de nouveau. Décidément, cela faisait beaucoup de sourire pour une seule journée ! Si l’idée de parler à des étrangers lui donne des frissons, comment se faisait-il que l’on discute un peu ? Moi aussi je suis un étranger non ? Moi je suis dangereux. Je suis un étranger dangereux. Sauve toi jolie Angela. Je ne veux pas te faire de mal. Tu es trop gentille pour ça…Court, va-t-en…Ne t’approche plus… J’aurai aimé lui dire mais j’avais envie de la revoir une autre fois c’est pourquoi je ne fis aucune remarque. Qu’avait-Il dit déjà lorsque j’étais tombé gravement malade ? Ah oui… Courageux petit lapin ! Puissé-je garder un souvenir exact de toi en cette nuit. Vivant.
Qui ? Quoi ? De ? Ah ! Mon compagnon ? Oui, suis-je bête…Je pensais à autre chose.

« Lui ? C’est Wolfang…Tu sais…Il est peut être bien mignon, toi tu es mignonne avec ta légèreté et ton sourire…Tu disais que devoir parler aux étrangers te donne des frissons mais je suis moi aussi un étranger et je ne te vois pas frissonner… »

Je ris. Quel bonheur ! Je regrette de ne pas l’avoir rencontré avant. Elle met un peu de changement dans mon humeur sombre. J’espère qu’un jour je ne me sentirais plus mal à l’aise face à elle et qu’elle n’aura plus peur. Nous pourrons peut-être être ami… Je l’espère sincèrement ! Mais je veux pas la forcer...Ni lui faire peur. Ni lui faire de mal…Ce soir même j’irai chasser pour assouvir mes minimes envies de sang, comme ça je pourrais toujours la revoir dans la semaine sans le moindre soucis. Cette perspective me plut mais les pensées de Wolfang me stoppèrent dans mon enthousiasme. Elle voulait partir, c’était compréhensible. Elle avait envie de revoir Masen. Un éclat de tristesse passa dans mes yeux mais s’effaça tout aussi vite.

« Je sais que tu veux revoir Masen, vas-y, je ne voudrais pas te retenir… J’espère qu’on se reverra mais si tu ne préfères pas, je pourrais comprendre…Amuse-toi bien avec Masen… »

J’esquissai un pâle sourire, déçu par l’idée de me retrouver de nouveau seul sous la pluie.

Je la regardais glisser doucement le long du mur pour finir par s’asseoir à terre. Sur le moment, j’aurais préféré utiliser le terme de s’effondrer car c’était bel et bien l’impression qu’elle me donnait. Je ne connaissais rien de sa vie, et pourtant je savais que cette attitude était due au poids des remords, inutile d’être devin pour le comprendre. Et de toute évidence, ça avait un rapport avec Justin. A mieux les observer, je pouvais remarquer que plus la joie de ce dernier semblait vraie, sincère, plus la tristesse de Kristen grandissait. A vrai dire, son désarroi me faisait de la peine. Elle me demandait si j’avais déjà perdu un être cher ? En ce qui la concernait, l’être cher en question était inévitablement ce garçon. Désormais elle ne le lâchait plus des yeux, et je lui laissais un moment avant de prendre la parole, sentant qu’elle en avait certainement besoin pour se reprendre.

Je me mis alors à réfléchir à la réponse que j’allais lui donner. Honnêtement, je n’ai jamais ressentie une si grande peine à cause de la perte d’un proche. Mon père n’a jamais été très présent, mais je ne lui en ai jamais voulu et je n’ai jamais considéré les longs mois d’absence sans le voir comme une perte en soi puisqu’il revenait toujours à un moment où à un autre, contrairement à mon frère qui lui, lui en voulait plus que tout. Mon frère … ce jeune homme d’aujourd’hui 23 ans qui n’a plus donné signe de vie depuis déjà 5 ans. A cette idée, mon cœur se serra légèrement. Pendant plus de deux ans, je l’ai attendu, pensant que, comme papa, il finirait bien par rentrer. Je l’imaginai très bien passant le seuil de la porte avec hâte, se précipitant avec hâte dans le salon pour embrasser ma mère, comme il avait l’habitude de le faire après une longue absence. Seulement la porte ne s’est jamais ouverte en trombe, ou tout du moins jamais avec lui derrière.

Cette absence, je l’ai palliée dans les livres, comme à chaque fois que j’ai une épreuve à surmontée. Très vite, j’ai eu l’impression que je me sentais mieux, que j’arrivai peu à peu à l’oublier, tout comme lui nous avait totalement zappées ma mère et moi. Mais je me rendis compte, en voyant Kristen dans cet état, que je n’avais fait que me mentir à moi-même, mensonge auquel je m’étais accrochée pendant toutes ces années. Oui, il était l’être cher que j’avais perdu, et ce définitivement.

Je gardai encore un peu le silence, prolongeant par la même occasion le répit que j’avais voulu donner à la jeune femme à côté de moi. Puis je finis par m’asseoir à côté d’elle afin que l’on soit au même niveau, ce qui est plus commode pour parler. Elle fixait toujours la même personne, tandis que moi je m’acharnais à ne pas détourner mon regard d’un point invisible que je m’étais créé.

« Oui, j’ai perdu quelqu’un … une fois … mais certainement pas pour les mêmes raisons que toi tu l’as perdu lui … »

Je ne bougeai pas, pas même un léger signe de la tête pour désigner Justin. Elle savait très bien de qui je voulais parler. Je l’ai senti se raidir, pourtant je n’ai rien dit ou fait pour excuser ma soudaine intrusion dans sa vie privée. De quel droit osais-je lui parler ainsi de lui, alors qu’elle ne me connaissait pas plus que moi je ne la connaissais ? J’aurais du regretter, mais je préférais attendre sa réaction, quelle qu’elle soit.

« Je n’ai pas perdu Justin ! Je l’ai juste brisé…C’est normal qu’il ne veuille plus m’approcher. J’ai été une idiote mais on a tous un jour où l’autre fait une erreur qui nous donnera des remords…Je suis désolé que tu aies perdu quelqu’un…C’est quelque chose d’atroce…Je suis désolé de t’avoir embêté Lisey. »

Je me relevai avec aisance. L’aisance même du vampire qui parfois défie les règles de l’apesanteur. Pour ma part, je ne suis comme ça. J’ai juste un peu d’aisance. Wolfang et Justin. Eux, ils défient toutes les lois physiques. Ils sont fascinants et intouchables, beaux et mystérieux, gracieux mais vifs. Wolfang aime énormément la vitesse et apprécie de courir avec son maître par tout temps. Sans doute cela les défoule-t-il ? Je leur jetai un dernier coup d’œil. Le loup observait avec grand calme Lisey. Il ne cillait pas. Il était semblable à une statue munie d’une fourrure éclatante de blancheur qui était doucement agité par le vent. Quant à Justin, il était de nouveau lui-même. Sombre. Je soupirai en me demandant si un jour il changerait. Certainement que non. J’aurai volontiers tendu la main à la jeune femme pour l’aider à se relever elle aussi mais je risquai de la glacer plus qu’autre chose. Hésitante, je finis malgré tout par lui proposer mon aide. Tant pis pour ma peau froide.

« Il me semble que nous avons cours ensemble et la cloche ne va tarder à sonner. Nous ferions mieux de commencer à nous diriger vers la salle car il me semble que les profs n’aiment pas les retardataires sans excellente excuse et je n’ai pas d’idée valable. Tu viens ou tu préfères y aller seule quand ça sonnera ? »

Je lui adressai un sourire. Oui. Pourquoi montrer ses véritables sentiments à une humaine ? Elle ne comprendrait pas combien ma peine est grande et si tant est qu’elle la devine, elle ne parviendrait pas à en comprendre les raisons plus que complexe. J’ai été stupide. Simple coup de blues. Aléa de la vie dira-t-on pour ne froisser personne.
Lisey me semblait être quelqu’un de bien même si elle ne me serait sans doute d’aucun secours. Autant en faire sa connaissance.

[Désolée pour le retard Kristen]


« Non, quel intérêt aurai-je à rester ici à attendre que les cours commencent ? Allons-y ensemble. »

Mes lèvres s’étirèrent en un sourire sincère. Cette jeune femme m’était assez agréable, je me doutais des efforts que cette amabilité devait lui coûter. Elle était malheureuse, malheureuse comme les pierres, si tant est qu’un vulgaire caillou puisse éprouver quoi que ce soit. Pourquoi tout à coup cette expression me venait à l’esprit ? Certainement parce que sa peau semblait parfaite, sans aucune imperfection, lisse comme les galets que l’on peut trouver au bord d’un point d’eau, si doux au toucher. Bref, je m’égard du principale, comme cela m’arrive souvent. J’étais donc en train de me dire que Kristen devait faire beaucoup d’effort pour ne pas se montrer désagréable, allant jusqu’à me sourire alors que sa peine était grande, certainement bien plus importante que le peu qu’elle laissait paraître.

Je saisis la main qu’elle me tendait, mais lorsque j’effleurais le bout de ses doigts, ma propre main eut un très léger mouvement de recul, comme si je venais de recevoir une petite décharge électrique, comme de celles que l’on peut recevoir en plein hiver avec un pull en pure laine. Mais je me repris rapidement, tout en espérant qu’elle n’ait rien remarqué, ce qui me paraissait tout de même un peu gros. J’attrapais sa main fermement, peut-être un peu trop mais je ne voulais pas qu’elle prenne mal le fait que j’ai d’abord hésité ou qu’elle se vexe. Elle m’aida à me relever avec beaucoup plus de force que je ne l’aurais cru. A la voir au premier coup d’œil, menue voire fragile, je ne me serais jamais imaginé qu’elle possède en réalité autant de force. Mais je ne m’attardai pas plus sur ce détail, après tout il ne faut pas se fier aux apparences, elles sont trompeuses.
Sa main était glacée, voilà pourquoi j’avais réagit d’une telle manière. C’était tout à fait normal en cette matinée humide et plutôt fraîche, enfin froide. Moi-même il m’arrivait de frissonner par moment malgré mes vêtements pourtant chauds, la seule différence entre la main de Kristen et la mienne était que la mienne était tout de même moins froide alors que mes doigts avaient pris une teinte rouge due humide fraîcheur qui régnait. Ses mains à elle étaient tout aussi blanches que d’habitude. Simple détail sans importance. Oui mais pourquoi, dans ce cas, lui accordais-je autant d’importance ? Je décidai de chasser cette idée de ma tête, enfin pour le moment.

D’autres élèves avaient eux aussi décidé de se diriger vers la salle où ils avaient cours avant la sonnerie, certains pour arriver les premiers en classe, d’autre pour se protéger de la pluie, tout simplement. Kristen et moi nous dirigions ensemble vers notre salle de cours.

« Je voulais te dire, à propos de ce que tu disais tout à l’heure : tu ne m’as pas embêtée, rassure-toi. Avoir un peu de compagnie ne me dérange absolument pas, bien au contraire. »

Je lui adressai un clin d’œil pour lui assurer que je ne disais pas cela par politesse. Un clin d’œil. N’importe quoi. Je me comporte parfois comme une vraie imbécile. Cette réflexion me fit sourire. Ah … pour qui allait-elle me prendre ? Le mieux pour moi était de zapper ce petit moment de honte de ma tête, oui, c’était le mieux qu’il me restait à faire.

« Des erreurs, tout le monde en fait, c’est indéniable. Plus ou moins graves, je te l’accorde, mais il n’empêche que tout le monde est concerné. Quant aux remords, c’est autre chose … leur poids est tellement dur à supporter. C’est pour cela qu’il faut faire tout ce que l’on peut pour réparer ses erreurs, en partant du principe que de toute manière, ça ne peut pas être pire. C’est tellement simple à dire, mais tellement difficile à exécuter, c’est la raison pour laquelle de nombreuses personnes préfèrent crouler sous le poids des remords plutôt que d’essayer de changer les choses. Il y a toujours une chance, le tout reste de savoir la saisir et de ne pas la gâcher. »